Conseils de lecture
La France sur le pouce
« Je vivais autrefois comme tout le monde. Et à l'époque, cette vie-là me convenait. J'avais un métier, une compagne, une voiture et des rêves plutôt communs. Je n'étais peut-être pas heureux... mais au moins n'étais-je pas malheureux. Ce qui n'est déjà pas si mal. » Ainsi débute La France sur le pouce, road-trip autobiographique d'olivier Courtois.
Une rupture amoureuse et une démission professionnelle suffiront à pousser Olivier Courtois hors de nos conforts habituels. Ce pas de côté, c'est lui qui l'a choisi : il a décidé de faire le tour de la France en stop, de tenter une autre vie, radicale mais pas marginalisante. En effet, Olivier garde ses réflexes de reporter et ouvre grand ses oreilles aux automobilistes qui ont la gentillesse de le prendre dans leur véhicule. Et ce tour de France ressemble peu à peu à une psychanalyse mobile d'une certaine France, celle des campagnes et des petites villes (les grandes sont peu propices à l'auto-stop) : l'ouvrier sans boulot, le père divorcé, la junkie, les malfrats mystérieux, les retraités amoureux...
Olivier Courtois est reporter :il transforme ces expériences en reportages. Et il fait de même avec ce voyage profondément personnel : il nous le transmet, pour notre plus grand profit et notre plus grand bonheur. N'étant pas dessinateur, c'est Phicil qui prend les crayons pour dépeindre cette France, tendre, belle mais parfois dure aussi.
Prends soin de toi
C'est l'histoire d'une libération, celle d'un homme qui reprend vie après un chagrin d'amour. Seul dans son nouvel appartement, Achille, notre héros rumine son désespoir. Heureusement, les travaux de rénovation lui occupent les mains et la tête. Un jour, vient le moment où il faut ôter le vieux lino qui recouvre le parquet. Et près de la porte d'entrée, là où le facteur glissait le courrier, Achille découvre une lettre, postée en 1976, et qui était destinée à la précédente locataire, Suzanne.
Cette vieille lettre obnubile Achille, elle l'intrigue, elle lui change les idées. Un jour, il cède à la tentation et l'ouvre : Tristan attend Suzanne à Marseille pour construire la vie dont ils rêvaient. Sur un coup de tête, Achille décide de partir à Marseille. Qu'espère-t-il y retrouver ? Que pense-t-il pouvoir faire de cette vieille histoire d'amour ? Sans doute ne le sait-il pas plus que nous mais c'est l'occasion pour lui de faire le deuil de la sienne et c'est aussi l'occasion d'un magnifique road-trip en vespa, qui passe par Avallon !
Grâce à un dessin très doux et à des couleurs chaudes, ce chagrin d'amour se fait lumineux. A découvrir de toute urgence !
Chemin faisant
Chemin faisant, Jacques Lacarrière (La Table Ronde, collection La Petite Vermillon)
Ce texte fait figure d'ancêtre dans la littérature de la marche. Sa première édition date de 1973, une époque où la marche n'est pas encore un hobby mais une pratique réservée aux malchanceux qui ne peuvent jouir de l'automobile. Combien de fois Lacarrière nous narre-t-il ses tentatives plus ou moins heureuses d'ailleurs de convaincre les automobilistes qu'il n'a nul besoin qu'on le dépose !
Que les choses soient claires : Jacques Lacarrière ne part nullement « randonner ! Il se « promène » ! La différence est de taille car le côté sportif de l'aventure lui échappe totalement : il parcourt 60 km les 3 premiers jours puis prend une journée de repos à l'hôtel pour s'en remettre. Idem pour ce qui est du matériel : il part en Pataugas avec une flasque de rhum et compte sur les ruisseaux pour se désaltérer.
Il part aussi sans itinéraire et sans carte, s'en remettant aux chemins et aux gens qu'il rencontre. Il part des Vosges, traverse le Morvan et l'Auvergne pour rallier la Méditerranée. Il passe par Epinal, Langres, Avallon, St Flour, Lodève... Lacarrière ne « fait » pas un parcours prédéfini : il trace son propre chemin dans la nature, parmi les hommes, loin des sentiers battus.
Il part d'ailleurs autant pour la nature que pour les hommes qui l'habitent. Il prend le temps de discuter avec un bûcheron, de boire un verre dans les cafés de campagne qui composent encore le paysage à l'époque, de dormir chez l'habitant le cas échéant. Ces hommes et ces femmes lui racontent, dans leurs patois souvent, leur travail, leur vie, l'histoire des paysages qu'il traverse. Dans Chemin faisant, pas de pensées philosophiques ni de descriptions interminables mais des rencontres humaines.
Alors pourquoi coucher tout cela sur le papier ? Pour immortaliser ces rencontres ? Pour faire souffler le vent de l'aventure chez ses lecteurs ? Ou pour continuer à dilater le temps comme c'est le cas dans ces ballades au long cours ?
Miniaturiste
Miniaturiste, Jessie Burton (Folio)
Amsterdam, fin XVIIème siècle : Nella Oortman débarque à seulement 18 ans ! Elle ne connaît rien à la ville, à cette société bourgeoise des grands marchands qui font la renommée mondiale de la ville, qui font du commerce avec le monde entier, vendant de tout à tout le monde. Elle vient d'un petit village, d'une grande famille noble sans le sou, habituée à vivre de peu dans une grande demeure glaciale. Elle a épousé, voici quelques mois, un parfait inconnu Johannes Brandt, le plus riche marchand de la ville, afin de sauver sa famille de la ruine.
Prise en étau entre son fantasme de la grande ville et la peur de quitter les siens, elle découvre à son arrivée que son récent mari est absent, occupé à sillonner le monde avec son bateau, qu'une femme tient déjà la maison (la sœur, laquelle se semble pas vouloir lui céder sa place), que cette ville riche et cultivée est aussi l'endroit où l'on est le moins libre au monde !
Un roman qui progresse discrètement : sous prétexte de suivre Nella, de nombreux indices sont disséminés qui ourdissent une trame plus riche et plus complexe qu'il n'y paraît de prime abord. Un roman foisonnant, intrigant et surprenant !
A nos amours
Ayant suivi des études en France puis s'étant marié à une Française vivant au Japon, J.P. Nishi ausculte, avec humour et malice, les différences culturelles entre nos deux pays.
C'est en nous racontant le quotidien d'un couple mixte qu'il décortique les travers et les habitudes étranges de nos deux cultures. Il moque aussi bien de notre habitude si particulière, si ritualisée et pourtant si peu explicable, de nous faire la bise : Karen , sa femme, a beau lui faire des schémas, cela reste obscur pour J.P. A contrario, il nous montre crument le machisme de la société japonaise. Comme on le devine avec ces deux exemples, J.P a souvent la dent plus dure avec son propre pays.
Un album publié de lecture français donc facilement accessible au lecteur européen. Un album drôlatique mais aussi sensible et fort.