Yv

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Je lis, je lis, je lis, depuis longtemps. De tout, mais essentiellement des romans. Pas très original, mais peu de lectures "médiatiques". Mon vrai plaisir est de découvrir des auteurs et/ou des éditeurs peu connus et qui valent le coup.

Serpent à Plumes

18,00
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11 octobre 2017

Dans une Alger qui s'islamise, Moul, diminutif de Mouloud, ainsi l'appelait Farida sa femme qui l'a quitté quelques années plus tôt, vit dans un appartement avec son caniche Harys. Il partage sa vie entre les visites chez la vétérinaire, fréquentes, car Harys est souffrant, Lara sa voisine, réfugiée syrienne, chrétienne qui monte souvent chez lui où ils font l'amour, souvent, régulièrement et la boisson, car Moul boit beaucoup de vin algérien, du whisky maltais et du café.

Moul et Harys se comprennent sans se parler, et pourtant, Harys, il ne lui manque que la parole, encore que...

Je finis volontairement par ces points de suspension, censés ouvrir un suspense terrible, qui laisse mes lecteurs pantelants. Eh bien, oui, en fait Harys, s'il ne parle pas, ben non, c'est un chien, s'exprime tout de même et il est le principal narrateur de ce roman. Roman que j'ai commencé dubitatif, car un chien-narrateur, ça me fait présager du pire. Mais que nenni, j'ai remisé très vite mes petites -je minimise, je ne vais quand même pas m'autoflageller sur le blog- arrogance et assurance, et me suis laissé embarquer par les phrases d'Amin Zaoui. Si je chipote un peu en regrettant quelques répétitions inutiles et autres procédés répétitifs et un peu trop systématiques, je n'ai pas boudé mon plaisir et je suis à deux doigts d'en faire un coup de cœur. C'est pour le moins un roman qui m'a plu tant par le fond que par la forme. Le fond d'abord qui parle de l'Algérie qui change, s'islamise, les femmes se voilent, les hommes ne tolèrent plus les dérapages, même pour Harys uriner sur un journal arabophone peut présenter un questionnement, car Harys urine sur des journaux que Moul dépose sur le balcon. La réflexion et le constat sont profonds sur le pays qui change, la religion qui mange les libertés, la Syrie en guerre, la radicalisation, le racisme, l'intolérance de la religion d'état envers les athées ou les croyants d'une autre religion. Moul ne se plie pas au règles de l'islam, il boit, fume, ne prie pas, ne respecte pas le ramadan, entretient des rapports avec une chrétienne, c'est Harys qui est comme la "bonne" conscience de Moul, celle qui lui dit quoi et comment faire selon les préceptes de la religion, qui parfois le questionne sur ses pratiques, mais il entend vivre et penser comme bon lui semble. Il faut dire pour le défendre que Lara est jeune, belle et vibrante d'un désir auquel Moul répond dans des paragraphes sensuels, chauds et vivants.

La forme maintenant. Amin Zaoui écrit par petites touches, un peu comme un abécédaire ou un dictionnaire : un mot ou une expression en avant et en gras et suit un petit texte en rapport. Parfois, ils se suivent, parfois non et c'est alors au lecteur de les lier, ce qui se fait très aisément. Une écriture simple et fluide, parfois très sensuelle, jamais vulgaire même lorsque Lara, qui ne porte jamais de sous-vêtement débarque dans l'appartement de Moul qui l'attend prêt, quasiment au garde à vous si je puis m'exprimer ainsi. Même si je n'ai pas toutes les références dans mes bagages, les noms des écrivains, poètes, prophètes ou musiciens cités par Amin Zaoui, ce n'est pas un souci pour suivre ce roman qui enserre le lecteur et ne le lâche qu'au bout, et encore, pas dit que Moul, Lara et Harys nous quittent sur le simple geste de tourner la page.

En voici le tout début, très court, juste pour initier le désir :
"Peau. Et je la serre dans mes bras comme un mythe vivant, Lara !" (p.9)

Ursula Kovalyk

Intervalles

19,00
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29 septembre 2017

D'après l'éditeur, l'excellent maison Intervalles, Uršuľa Kovalik est slovaque et "depuis longtemps impliquée dans la défense du droit des femmes et dans l'aide aux sans-abris. Elle dirige également une troupe de théâtre composée de personnes sans domicile fixe. Femme de seconde main est son premier roman traduit en français", et c'est fort dommage car si les autres sont aussi bons que celui-ci, il est plus que temps de découvrir cette auteure, ou alors, si je prends ce constat avec mon optimisme naturel, c'est une excellente nouvelle, car ça me fera plein de textes à découvrir lorsqu'ils seront traduits. Uršuľa Kovalik part d'une idée simple, les gens dans les grandes villes sont seuls accaparés par leur travail ou dans le cas de ses héros, gêné par leur maladie ou acheteuse compulsive qui ne vit que pour cela. Sur ce constat, elle bâtit son histoire et la société de Gabriela qui vend de l'amitié et rien que cela, pas de sexe. Elle-même est seule avec sa chienne Hilda et son nouveau travail est sans doute aussi important pour elle que pour ses clients.

Très habilement, la romancière parle de la solitude, de la difficulté de vivre très isolé et très chichement, de l'anonymat des grandes villes, d'une génération de trentenaires qui semble en difficulté, sans vrai repère dans ce pays jamais nommé mais dont on imagine aisément qu'il est le sien, la Slovaquie, qui fut jusqu'en 1993, une partie de la Tchécoslovaquie communiste.
Les personnages de Uršuľa Kovalik sont très présents, Gabriela en tête, mais ses clients itou, tous avec leur forte personnalité et leurs blessures visibles ou enfouies, et l'on apprendra à les connaître tout au long du roman.
Deux-cent soixante-dix pages auraient pu paraître longues, et c'est au moment où l'on commence à y penser que l'auteure crée le rebondissement qui relance son histoire qui prend ainsi une tournure et une dimension différentes. Uršuľa Kovalik s'attarde aussi pas mal sur des descriptions de lieux, de la nature, de personnes, de situations pas forcément en rapport direct avec son histoire mais qui apportent un côté décalé, comme lorsqu'une conversation ou une réunion de travail nous ennuient -qui n'a jamais vécu cela?- et qu'on regarde dehors si les lieux le permettent où que notre esprit divague à la suite d'un mot entendu ou d'une attitude d'un collègue, c'est sain et naturel -enfin, ça l'est pour moi, j'espère ne pas être le seul dans ce cas, ça m'arrive souvent (j'espère que mon chef ne lit pas mon blog).
Une auteure et un roman à découvrir qui débute justement par une des descriptions dont je parlais à l'instant, non dénuée d'humour, un humour présent malgré un thème pas toujours gai, un humour parfois noir, grinçant qui donne à la lecture un goût de légèreté tout en faisant passer le message :
"La peinture marron fécal et bon marché des murs de l'agence pour l'emploi semblait ce matin-là un soupçon moins merdâtre. L'écorce rigide d'une branche, parsemée d'un jaune fluorescent, dessinait une longue ligne oblique sur le crépi du bâtiment. Des tickets de bus usagés traînaient au bord du trottoir, tels des vieillards desséchés sur une plage naturiste. Personne ne se pressait." (p.5)

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29 septembre 2017

Suite de Bye bye Lisa Dora, la course a enfin lieu et tient toutes ses promesses. "Fane dessine les voitures et les motos comme personne, et se fait un plaisir avec cette course : les chocs, les accidents, les déformations qu'ils impliquent. Il coupe son histoire de réclames dessinées et ajoute un numéro spécial en fin de volume expliquant la genèse des divers participants, une biographie plus détaillée des plus importants sous forme d'un magazine Sports cars& motorcycles magazine.

Fou, fou, fou, tout peut arriver dans cette course de streamline. "Fane y ajoute une touche d'ambiance noire avec William Boney dit The Kid, fugitif et ennemi public qu'une organisation gouvernementale aimerait bien faire disparaître. Mais bien sûr le suspense le plus grand réside dans le nom du gagnant, Cristal pourra-t-elle garder son terrain sur lequel elle habite et travaille depuis plusieurs années ? Amateurs de grosses cylindrées, de moteurs rugissants, de caractères bien trempés, de coups tordus courez chercher les deux tomes de Streamliner. Les autres, feuilletez les albums et vous ne devriez pas le regretter, l'aventure est au rendez-vous ainsi qu'un constat -ou une critique- de la télé étasunienne de l'époque, prête à tout pour faire de l'audience : violence retransmise en direct et même les coupures de pub.

Évidemment, les tons sont bruns, couleur du désert, bleutés lorsque la télé diffuse un reportage. Fane fait feu de tout bois pour mon plus grand plaisir que je ne boude pas.

Cargnelutti, Patrick

Jigal

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29 septembre 2017

Polar qui démarre très bien, dans une maison de retraite, lieu assez insolite pour y placer ce qui ressemble à un meurtre, et peut-être même perpétré par un pensionnaire. La lieutenant Céleste Alvarez est un personnage que l'on n'a pas l'habitude de rencontrer dans ce genre de romans : pas forcément jolie, vestimentairement pas au top et quelques rondeurs qu'elle soigne à coup de kebabs accompagnés de frites, c'est mieux, de burgers et autres viennoiseries. Elle dessine et est sensible aux couleurs qu'elle voit sur les scène de crimes ou d'enquêtes, si elles se répètent c'est alors que l'affaire est pour elle. Point de vue original pour une flic qui l'est tout autant. L'intrigue est bien menée et si elle souffre de longueurs, elle est notamment assez longue à démarrer et traîne un peu avec des répétitions et des détails qui personnellement ne m'ont rien apporté ni dans la compréhension de l'histoire ni dans la psychologie des protagonistes, elle est quand même prenante jusqu'au bout du bout. Bon, j'aurais bien ôté quelques pages à ce volume qui en compte 350, mais c'est mon côté bougon et amateur de romans courts. Autre bémol : je trouve que Patrick Cagnelutti dialogue trop son polar, mais encore une fois c'est très personnel. Néanmoins, dans la quatrième de couverture, il est fait mention d'un "roman noir hors norme", et là, je rejoins la personne qui a trouvé cette expression. Hors norme, car comme je le disais plus haut, la lieutenant Céleste Alvarez l'est, tant par son physique que par son caractère et l'intrigue qui nous emmène jusqu'aux États-Unis dans les années hippies, la guerre du Vietnam, et prend sa source dans la France de la guerre peut être qualifiée avec les mêmes termes. Un autre point primordial est que la part belle est faite à l'humain qui est au centre de l'intrigue et du roman en général. Point de technologie de pointe qui prend le dessus, non ici ce sont les femmes surtout et les hommes un peu qui dominent.

Une belle découverte. Un bon polar Jigal -comme d'habitude- qui débute presque par une onomatopée :

"Lundi 9 janvier 2017

Résidence pour personnes âgées Les lilas - 3h30

Tac-tac, tac, tac-tac, tac, tac-tac, tac...

Exaspérant et bruyant, ce déambulateur. Exaspérante, cette lenteur extrême." (p.9)

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29 septembre 2017

Vive la suite des aventures du vaisseau Infinity 8. Cette fois-ci, si Lewis Trondheim est toujours au scénario, il s'est adjoint les services de Davy Mourier pendant que Lorenzo de Felici dessine. Ann Ninurta change des autres héroïnes de la série. Mère-célibataire, elle se bat pour garder sa fille et si ses missions sont importantes, sa vie de mère l'est également. C'est donc un dilemme auquel elle fait face lorsqu'elle doit aller au bout de ses limites et peut-être même risquer sa vie -mais, ça je n'en dirai pas plus.

Pour ce cinquième épisode, qui en compte 8, je le rappelle pour ceux qui ne suivraient pas ce blog assidument, ce qui, je le rappelle itou, est une faute de goût, une erreur monumentale, que dis-je, un erreur impardonnable -sauf bien sûr si vous vous précipitez, vous abonnez et faites exploser mes statistiques, et comme ça je deviendrais le maître des blogueurs, ah ah ah ah (rire sardonique)... bon, je crois que je vais me calmer un peu sur la SF.

Pouf pouf, je reprends, puisque je n'ai pas fini ma phrase précédente, je disais donc : pour ce cinquième épisode, qui en compte 8, je le rappelle pour ceux qui ne suivraient pas -euh, non, ça je ne le répète pas-, pour cet épisode donc, l'héroïne est confrontée à des zombies. Chouette. Oui, mais non, parce que des zombies, c'est cool, mais là, ce sont des zombies aliens, encore plus mieux que cool. Et puis Ann, elle est cool aussi, elle ne dit pas non à un petit coup en douce avec un beau mec, même si les fameux zombies-aliens perturbent un brin les flirts et que conter fleurette à un beau gars lorsqu'on est entourée de monstres morts-vivants est un peu étrange.

Atmosphère à la fois légère et tendue pour cet excellent épisode de cette excellente série. Tout est bien comme d'habitude, scénario, dessins et couleurs. Vite, la suite !